On pose la question de l'hypercentre dans les conseils de quartier comme lors des repas de retraités ; il en remonte une approbation de la nécessité d'une intervention dans ce secteur, mais aussi une sous-information, une inquiétude sur les projets et les rythmes, et une demande de discussion. La campagne de pétition pour une réunion extraordinaire du Conseil municipal pèse dans le même sens. C'est ce qu'il faut comprendre de la réplique du maire lors du Conseil municipal du 28 janvier 1999. A l'occasion du vote sur le budget, il a affirmé que "cette opération est très largement soutenue lorsqu'elle est décrite exactement, pas quand on fantasme pour essayer ensuite de provoquer des peurs comme je le lis ici et là dans quelques pamphlets diffusés dans la ville et qui ont pour objet de distraire les Montreuillois quand ils sont lassés de la télévision". A ce même conseil, 8 délibérations votées concernaient l'achat de lots ou des indemnités d'éviction commerciale dans le centre commercial Terminal 93. Le maire a précisé à ce sujet que 80% des surfaces étaient maîtrisées par la Ville, avec "un dérapage financier inférieur à 1%" au regard des prévisions. Et réaffirmé que, voté dès 1992 par le Conseil, le projet avait, lors des nombreux votes suivants, été confirmé à chaque fois, et était donc totalement définitif.
Pourtant, tant que la convention d'aménagement n'est pas signée, et même tant que les démolitions n'ont pas commencé, rien n'est définitif.
Le saucissonnage du débat au Conseil municipal
Depuis le début, le dossier de l'hypercentre souffre d'un déficit démocratique. Quand il est question au début des années 90 de rénover ce secteur, le dossier est attribué à Siza, architecte célèbre, sans concours mettant en concurrence plusieurs projets. Une seule option sort des études de 1992/93 (tout raser sauf les tours pour remettre au niveau du sol). La municipalité n'a jamais depuis accepté d'entendre d'autres propositions.
Comment les élus ont-ils
participé
collectivement à cette décision ?
L'option semble
avoir été validée à un
Bureau Municipal
en 93, bien que des adjoints de l'époque
n'aient pas sou-venir
de ce passage. Le point du projet est
régulièrement
fait depuis 3 ans au BM sans remise en
cause possible de l'agencement
général. Comme l'a
rappelé Montreuil Dépêche,
la rénovation
de l'hypercentre avait fait partie d'un débat
plus
général au Conseil municipal à
cette
époque sur le schéma régional
d'aménagement.
Depuis 1995, seules des décisions
très partielles
ont été prises en Conseil, dont
les principales
ont été :
- la création
d'une AFUL (Association Foncière Urbaine
Libre),le 29/02/96,
uniquement pour mener les études préalables
avec des
partenaires privés et publics, et dont
l'existence
était limitée au 31/12/98.
- l'achat
d'ATAC, le 24/04/97, avec seulement 25 votes favorables
sur 53
élus
- la modification du POS et la convention avec la
RATP le 23/04/98
- le programme des espaces publics, le
26/11/98
Tout achat d'un lot dans le centre commercial a fait l'objet d'un vote (obligatoire), et d'autres ont concerné le relogement de la Bourse du Travail. Le nombre important de délibérations du Conseil concernant l'hypercentre ne saurait cacher l'essentiel : jamais un débat global ne s'y est déroulé.
Informer n'est pas débattre
En direction de la population, la situation n'est guère plus brillante. Deux grandes messes pour présenter le projet avec Siza en 1993 et 1996, plusieurs dossiers dans Montreuil Dépêche, deux expositions (Maison Populaire en 1997, Centre Pablo Picasso en 1998). Le compte n'y est pas, même si Catherine Puig, adjointe en charge de l'urbanisme, a estimé récemment dans le journal du PC montreuillois, que l'ensemble constituait une démocratie exemplaire. Le jeu des questions / réponses lors des grandes messes n'est pas un débat démocratique, d'autant plus que, comme pour les remarques faites à l'occasion des expositions, il n'a été tenu aucun compte des critiques et propositions faites à ces occasions.
Où est le débat contradictoire sur l'enjeu urbain ? Où est le débat sur la priorité accordée à l'hypercentre, sur la masse des investissements qui font défaut dans de nombreux quartiers de la ville ? Où est le débat sur le contenu du programme d'aménagement, et sur les alternatives possibles ?
Plus grave encore, l'engagement écrit pris devant les électeurs dans la charte municipale en 1995 n'a pas été respecté : "la réflexion entamée sur la restructuration du centre-ville sera poursuivie avec les habitants", est-il écrit dans la charte. Jamais, dans la campagne électorale, il n'avait été question de passer à la réalisation et d'en faire la priorité municipale pour les 6 ans de mandature.
Et les perspectives de débat pour les mois qui viennent ne sont pas meilleures.
Enquête publique ou non
Les enquêtes publiques sur des projets d'aménagement sont souvent formelles et mobilisent peu les habitants concernés. Mais, en attendant des réformes vers davantage de démocratie, elles ont le mérite d'exister; elles imposent des délais, et sont un point d'appui pour le débat public; elles permettent de faire enregistrer les points de vue par le commissaire enquêteur. L'enquête publique sur le POS avait permis quelques petites améliorations.
Sans surprise, la municipalité s'évertue à éviter toute enquête publique globale sur le projet "hypercentre". Le POS a ainsi, dans ce secteur, été modifié par une "mesure antici-pée" de révision par le Conseil municipal d'avril 98, sous prétexte que le permis de construire pour l'immeuble "pharmacie" (angle Walwein / Franklin) devait être déposé dès l'été 98. L'ancien POS ne permettait pas un immeuble de cette hauteur à cet endroit. Tous les règlements permettant la réalisation de l'opération "hypercentre" ont donc ainsi été modifiés à la sauvette, puis confirmés lors de la révision générale du POS à l'automne 98. Réputée, selon la municipalité, en dehors du POS (ce qui était vrai du programme des travaux, mais pas des règlements qui les permettent), l'opération était noyée dans l'en-semble du POS.
En octobre dernier, une expertise juridique était encore en cours sur le montage possible, mais une simple "concertation" (une réunion officielle) pilotée directement par la Ville semblait suffire, au lieu d'une enquête pu-blique avec un commissaire extérieur. De même, une ZAC en régie directe par les ser-vices de la Ville paraissait possible, sans in-tervention d'une SEM ou d'un opérateur privé. Quand le nouveau POS sera définitif, quand la convention avec Altaréa sera prête à être signée, alors une délibération du Conseil municipal devrait lancer la concertation, et une seconde, 2 ou 3 mois plus tard, boucler définitivement le dossier.
Ce n'est pas une exposition permanente à la mairie, pour présenter le projet et informer de l'état d'avancement des futurs travaux qui apportera beaucoup de démocratie supplémentaire.
L'information, la concertation, la participation
à
l'élaboration et à la décision sont
trois
étapes différentes d'un processus
démocratique.
Pour la rénovation de l'hypercentre et
ses enjeux considérables,
la municipalité n'a pas
dépassé le stade
d'une information uni-latérale
et partielle. C'est inquiétant
pour la démocratie
à Montreuil.